• a guerre est désormais ouverte entre Israël et le Hamas, qui a pris le pouvoir par les armes dans la bande de Gaza le 15 juin 2007. Cette semaine, 33 Palestiniens ont été tués et une pluie de roquettes s'est abattue sur le sud de l'Etat juif, sans faire de victimes. "Une guerre est en cours dans le Sud, chaque jour, chaque nuit. Nous poursuivrons nos opérations avec sérénité et détermination", a déclaré, jeudi 17 janvier, le premier ministre israélien Ehoud Olmert. "Cette guerre ne s'arrêtera pas" tant que les tirs ne cesseront pas.

    Les autorités israéliennes ont donc décidé d'intensifier leurs opérations dans la bande de Gaza, afin de mettre à genoux les islamistes du Hamas. Cette pression est militaire et économique. Depuis vendredi, la bande de Gaza est également soumise à un blocus total. Tous les points de passage qui, depuis que ce territoire a été déclaré "entité hostile" le 19 septembre 2007, ne laissaient passer que le minimum de marchandises et un nombre extrêmement limité de personnes, sont totalement bouclés.

    Même l'aide humanitaire ne passe plus, a déploré l'Unrwa, l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens, pour qui "l'isolement accru ne fera que radicaliser davantage sa population démoralisée". Près de quatre Palestiniens sur cinq (1,5 million d'habitants) étant dépendants de l'aide internationale, la situation peut rapidement empirer même si, pour le moment, personne ne meurt de faim. "Il y a une augmentation des cas de rachitisme chez les enfants. Il n'y a plus de ciment pour les tombes et les hôpitaux fournissent des draps pour remplacer les linceuls. Même dans la mort, les Palestiniens sont affectés par le blocus", a déploré Christopher Gunnes, porte-parole de l'Unrwa.

    "C'est au Hamas de décider s'il veut se battre ou prendre soin de la population", a déclaré Shlomo Dror, porte-parole du ministère de la défense israélien, ajoutant "qu'il n'y aura pas de crise humanitaire à Gaza, car il y a suffisamment de nourriture", et que la situation sera réévaluée la semaine prochaine. Il a précisé que, "si le lait vient à manquer, une autorisation de livraison sera demandée au ministère et elle pourra entrer". John Holmes, secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires de l'ONU, a protesté contre cette "punition collective", estimant que "la réaction israélienne n'est pas justifiée par ces tirs de roquettes, même (s'ils) en sont la cause".

    Quatre raids aériens ont été menés, vendredi, dans la bande de Gaza, tuant trois personnes et en blessant des dizaines d'autres. Un F-16 a détruit l'ancien ministère de l'intérieur inoccupé, causant la mort d'une femme, blessant une cinquantaine de personnes et endommageant près de quinze maisons. Une autre attaque a eu lieu contre un local de la police maritime.

    Israël a haussé d'un cran ses objectifs en s'attaquant directement à des bâtiments du pouvoir islamique. Cette recrudescence de la tension se produit moins d'une semaine après la visite du président américain George Bush et alors que les pourparlers de paix sont entrés dans le vif du sujet.

    Michel Bôle-Richard ( Lemonde.fr)

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  • Le mot a été lâché par le président de la République et conforté par son ministre de l’Intérieur: « Les terroristes servent des intérêts étrangers, des capitales étrangères et des dirigeants étrangers ». S’il ne s’agit pas d’une réaction émotive, de qui parle-t-on ?

    Difficile de considérer Oussama Ben Laden ou Ayman Edhawahiry comme étant des dirigeants étrangers ou les représentants de « capitales étrangères », c’est-à-dire, dans le langage diplomatique et journaliste usuel, des Etats. Personne ne prend de gants avec ceux-là pour les désigner comme des terroristes. Alors à qui pensait Abdelaziz Bouteflika en désignant des « capitales étrangères » et des « dirigeants étrangers » ?

    L’Iran ? Outre que le régime des mollahs n’a pas d’atomes crochus avec les radicaux salafistes, on peut constater que, contrairement à la décennie 90 où l’on ne manquait pas de le désigner comme un soutien au terrorisme, les rapports entre Alger et Téhéran sont plutôt bons et que sur de nombreuses questions ils sont dans la convergence d’intérêts. Mieux, lors de sa dernière visite, Ahmadinejad a reçu un appui remarqué de la part du Président sur le délicat dossier nucléaire qui oppose l’Iran aux Occidentaux, Etats-Unis en tête. Téhéran, en dépit de la manière dont elle est présentée dans les médias occidentaux, a une attitude très rationnelle. Elle n’a pas de raison objective de créer des problèmes à l’Algérie et à son gouvernement.

    Le Maroc ? On peut supposer qu’il est désormais suffisamment brûlé par le fléau pour qu’il ne se risque pas à jouer avec ce feu. Qui alors ?

    Les Américains ? Voilà une thèse déjà suggérée par Louisa Hanoune, à la suite de l’épisode de « l’alerte imminente » aux attentats lancée par l’ambassade des Etats-Unis en avril dernier et qui avait provoqué des scènes de panique dans la capitale. C’était dans un meeting public. La présidente du PT avait affirmé que les attentats contre le Palais du gouvernement et le commissariat de Bab-Ezzouar n’étaient pas du « terrorisme aveugle » mais une attaque ciblant « l’Etat algérien ». Ses arguments ? La « renationalisation » des hydrocarbures découlant de l’abrogation de la loi sur les hydrocarbures libéralisée qui déplairait à Washington, son refus d’accepter la présence de bases étrangères.[/b] C’est le privilège de celui qui n’exerce pas de fonctions officielles que de pouvoir exprimer ses convictions et analyses sans grandes contraintes que celles de la vraisemblance. Yazid Zerhouni avait à l’époque évité d’aller sur le terrain de Louisa Hanoune en recourant à une formule imagée pour exprimer sa colère: « Ils nous prennent pour des canards sauvages ! ».

    [b]Mais ce n’est pas un secret de dire qu’il ne manque pas de gens à partager les suspicions exacerbés de Hanoune, même s’il est clair qu’on est dans le domaine de la présomption et non celui de l’information. Même la « qaïdisation » du GSPC a été perçue comme une forme d’américanisation du jeu
    , qui serait celle d’un activisme radical sans attaches nationales qui justifierait la réponse « antiterroriste globale » des Américains. Et qui couvrirait aussi, « en dernière instance », diraient les marxistes, des appétits économiques comme l’énergie et les matières premières. Bien sûr, il y a beaucoup d’éléments qui ne cadrent pas avec cette lecture qui est une prise de position politique et non de l’information.

    Alors, quelles sont donc ces capitales étrangères ? Il faudra se contenter de l’équivoque de la situation, car ni Bouteflika ni Zerhouni ne semblent en mesure d’aller plus loin dans la désignation « des intérêts étrangers, des capitales étrangères et des dirigeants étrangers » qui profitent des actes terroristes. Si c’est un langage codé, il a peut-être été compris par les destinataires.

    « Il n’y a personne en Algérie qui pourrait tirer profit de ce genre d’attentats », a dit Zerhouni, comme s’il incitait à regarder ailleurs. Mais on n’est pas très avancé d’entendre dire que l’Algérie est « revenue en force sur la scène internationale, notamment dans le domaine économique » et que « cela a peut-être gêné certains intérêts étrangers ».

    quotidien-oran.com


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  • our se faire entendre, les Algériens ont choisi le silence. En refusant dans leur grande majorité de se rendre aux urnes, le 17 mai, pour renouveler leurs députés, ils n'ont pas suivi les appels au boycott lancés par la branche d'Al-Qaida au Maghreb. Ils ont en réalité manifesté leur refus de cautionner davantage le semblant de vitrine démocratique qui leur est imposé depuis des années : institutions vides de sens et de pouvoir, multipartisme de façade, responsables politiques réduits à l'état de pantins... Jamais la population algérienne n'avait manifesté un tel désintérêt pour une consultation électorale depuis l'indépendance du pays : 35,5 % de participation, selon le taux officiel. Dans la réalité, sans doute encore moins (entre 12 % et 20 %).

    Le pouvoir a-t-il entendu le message qui lui était adressé ? A écouter Yazid Zerhouni, le ministre de l'intérieur, se féliciter, d'une voix monocorde, deux heures durant, vendredi 18 mai à Alger, du succès de ces élections législatives, on peut en douter. Difficile de savoir si le ministre croyait à ce qu'il disait ou s'il ne cherchait qu'à sauver les apparences, face à la presse algérienne et internationale. M. Zerhouni pourra-t-il jamais mesurer, en tout cas, l'ironie de la situation lorsqu'il a célébré "la maturité politique" dont venaient de faire preuve les citoyens algériens à l'occasion de ces élections législatives ?

    Sur ce point, le ministre ne se trompe pas. La société algérienne n'est pas immature. "Elle est même très bien informée sur les standards minimaux d'une vie politique sérieuse. Ne pas le comprendre ne peut mener qu'à des déconvenues, souligne K. Selim, éditorialiste au Quotidien d'Oran. Le système en place est totalement organisé sur une logique de conservation et surtout de défiance à l'égard d'une société qui s'est rebellée en 1988 et qui a "mal voté" (en faveur des islamistes) en décembre 1991. Et il ne semble pas près de sortir de cette fixation qui le pousse à décider lui-même de la représentation des Algériens."

    Le pouvoir reste en effet hanté par la victoire du Front islamique de salut (FIS), il y a seize ans. Il n'a de cesse, depuis, de façonner une scène politique à son image, en entretenant artificiellement des apparences de partis - la nouvelle Assemblée populaire nationale (APN), truffée de plus d'une vingtaine de formations différentes, certaines microscopiques, a des allures de mosaïque -, à coups aussi d'interdictions, d'éliminations ou, à l'inverse, de regroupements forcés.

    Dernier exemple en date de ces manipulations à courte vue : la disparition du parti El Islah du paysage politique. Par des manoeuvres administratives, le pouvoir a éliminé il y a deux mois Abdallah Djaballah, le chef charismatique de ce parti islamique agréé, non membre de l'Alliance présidentielle. Dans la nouvelle APN, El Islah (conduit par un autre leader, sans légitimité) ne dispose plus que de trois sièges, contre quarante-trois précédemment. Or M. Djaballah conserve une réelle popularité au sein d'une bonne partie de l'électorat islamiste en Algérie. A l'inverse de son frère ennemi, le Mouvement de société pour la paix (MSP, ex-Hamas), cet islamiste pur et dur, à l'allure austère, n'a jamais accepté d'entrer au gouvernement et a toujours exprimé des positions critiques à l'égard du pouvoir.

    El Islah n'a sans doute pas tort d'affirmer qu'il a été écarté parce que faisant de l'ombre au FLN et que son chef Djaballah devenait une figure trop visible de la scène politique algérienne. Mais escamoter M. Djaballah ne le fait pas disparaître. D'autant que les chaînes de télévision paraboliques du Golfe, Al-Jazira notamment, s'empressent de lui offrir leur antenne. Son éviction suscite une grande frustration en Algérie, au sein de l'électorat islamiste. Même problème avec l'ex-FIS, dorénavant interdit, mais dont les chefs historiques, Abassi Madani (exilé au Qatar) et Ali Benhadj (resté à Alger), conservent leur aura. Soigneusement annoncés à l'avance, les déplacements d'Ali Benhadj dans les mosquées d'Alger sont suivis avec une ferveur discrète mais réelle par de nombreux fidèles, souvent des jeunes.

    APPARITIONS INOPINÉES

    Gracié, donc libre de ses mouvements comme beaucoup d'autres islamistes depuis la "réconciliation nationale", il y a un an et demi, Ali Benhadj semble tenté de mettre fin à la retraite que le pouvoir lui avait imposée, ces trois dernières années, à sa sortie de prison. Le numéro 2 de l'ex-FIS fait de plus en plus fréquemment des apparitions inopinées ici et là - à Blida, Alger ou ailleurs -, quitte à plonger dans l'embarras ou la fureur ceux à qui il rend visite de façon ostensible...

    Seize ans après l'interruption du processus électoral, le pouvoir algérien ne peut que le constater : le traitement autoritaire de l'islamisme est un échec. L'électorat islamiste refuse de se laisser capter par les partis du pouvoir. D'où le gouffre qui sépare les partis de la société, d'où surtout la crise de la représentation politique en Algérie. En janvier 1995, une proposition de solution - le "Contrat de Rome" - était apparue. Parce qu'elle préconisait de vrais mécanismes légaux pour quiconque accéderait au pouvoir et qu'elle insistait sur la question des libertés, elle allait être rejetée par le pouvoir. Mais l'Algérie, si elle veut avancer, pourra-t-elle éviter éternellement d'établir un vrai contrat entre le pouvoir et les forces politiques réelles ?

    Pour l'heure, le "système" est surtout préoccupé de sa survie. Les jeux d'ombres se multiplient, alors que la santé du président Bouteflika décline. Le peuple algérien est tenu dans l'ignorance de l'état réel de son président, ce qui ajoute au climat d'incertitude et d'anxiété. Officiellement, M. Bouteflika est en pleine forme. Il est même "infatigable", a affirmé, le 18 mai, le chef du gouvernement, Abdelaziz Belkhadem, contre toute évidence. "L'entourage du président parvient presque à donner le change. Mais ce qu'il n'arrive pas à faire, c'est à masquer ses absences prolongées", admet un membre du pouvoir.

    Soumis à des traitements répétés - qui le redopent un temps -, préoccupé par le mauvais état de santé de sa mère, âgée de 91 ans, plus encore que par le sien, M. Bouteflika ne préside plus vraiment la maison Algérie. D'autres s'en chargent pour lui. Ils le font dans la pagaille, sans la lucidité et la capacité d'anticipation que réclame le pays. L'Algérie est en état d'ébullition sociale. Les jacqueries se poursuivent, du nord au sud et d'est en ouest, parfois une semaine durant. Privés de véritables représentants, les jeunes Algériens ne connaissent que l'émeute comme moyen d'expression. L'étincelle menace depuis longtemps d'enflammer le pays. Il suffirait d'un rien...

    Florence Beaugé ( lemonde.fr)

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